Harcèlement de rue relayé par les médias

Je suis une jeune femme d’origine lyonnaise habitant désormais à la Réunion. Je me rends à Lyon pour les vacances mais fais d’abord une nuit à Brignais. Le matin du 30 juin, je prends le C10 et m’arrête à Bellecour. Je fais quelques pas en direction de la place, arrive au passage piéton et voit un jeune homme étrange aller vers plusieurs personnes sur la place Antonin Poncet. Il passe à côté d’une jeune femme en longue robe grise et fait mine de lui donner un coup de pied, elle s’écarte d’un bond. Je suis stupéfaite et lui lance :
” Mais qu’est ce que tu fais, là ?”
Il se retourne vers moi, surpris et commence à s’approcher de façon menaçante. Un ou deux garçons comprennent qu’il va s’en prendre à moi et interviennent en disant qu'”il ne faut pas taper les filles”. Il me regarde de haut en bas – j’ai un look de baroudeuse avec ma combi et mon gros sac-à-dos – et me traite de pute.
Je continue ma route mais je le garde dans ma vision périphérique, méfiante. Je me dis que j’aurais dû le prendre en photo.
Je l’entends à quelques mètres sur ma gauche, aller emmerder diverses personnes, dont un petit groupe d’hommes à un arrêt de bus. L’un d’eux appelle la Police parce qu’il constate que le jeune homme me suit. Il dit d’ailleurs :
“Tu dors où ce soir ?”.
Je l’ignore encore. Effectivement, je ne cherche qu’à regagner mon hôtel et me reposer.
Arrivée devant le Mac Donald, au croisement de la rue de la République et de la rue Edouard Herriot, rue présumée où se trouve mon hôtel, je consulte mon téléphone.
C’est alors que je le vois m’agripper de derrière, il était venu jusqu’à moi et voulait continuer son horrible manège. Mais il n’est pas le seul : inquiet, l’homme qui avait appelé la Police était venu pour me prévenir.
Le jeune homme commence alors à faire mine de me donner des coups, de tête, de pied, il avance et recule, je lis la rage dans ses yeux. Des personnes tentent d’intervenir mais il est de plus en plus violent. Je ne sais pas comment me dépêtrer de cette situation. L’idée d’utiliser mon portable me revient alors. Tremblante mais assurée, j’arrive (pour une fois) en un temps record à trouver la caméra et enclencher une vidéo, en le prévenant. Cela ne l’arrête pas et je parviens à capturer quelques secondes de l’altercation.
Une personne arrive enfin à le faire partir et il continue sa route direction rue de la République, comprenant peut-être aussi les conséquences que pourrait avoir cette vidéo. (harcèlement de rue)
Je suis choquée par cette situation qui semble enfin se terminer, l’homme et une jeune femme à vélo restent avec moi et me parlent.
Nous nous attendons aussi à l’arrivée des policiers. Et nous attendons. 20 minutes après, toujours rien. J’appelle à mon tour, convaincue que ma vidéo pourrait leur être utile.
Je me fais très mal recevoir par téléphone, je comprends qu’il n’y aura aucune intervention et l’agent au bout du fil prend simplement et nonchalamment la description physique, même après que l’homme Bon Samaritain ait également pris le téléphone.
Je suis stupéfaite. Je fais mon check in à l’hôtel, essaie d’entreprendre une sieste mais n’y parvenant pas, j’envoie la vidéo à plusieurs médias, à chaud.
Actu Lyon m’appelle dans l’heure et est le premier à être intéressé par mon histoire:

https://actu.fr/auvergne-rhone-alpes/lyon_69123/lyon-tu-dors-ou-ce-soir-elle-filme-le-jeune-homme-qui-la-harcele-place-bellecour_52149568.html

Par la suite, CNews me contacte, d’abord pour répondre à quelques questions, puis me propose un Direct dans la matinale du lundi suivant, le 4 juillet.
Le mardi 5 juillet, j’arrive sur Lyon tard et BFM m’interviewe en retraçant les faits sur place avec moi. J’essaie de faire passer quelques avis sur le harcèlement de rue qui concerne tout le monde – après des commentaires haineux et ciblés sur les réseaux de CNews.
J’ouvre mes invitations Messenger et me rend compte qu’une dame m’a contactée, sa mère a vu le reportage CNews et a reconnu l’homme qui lui avait jeté du ketchup vers les Halles Bocuse. Il avait également agressé une femme à vélo juste après elle. “Pour moi ce n’était que du ketchup mais si la prochaine fois l’envie lui vient de jeter de l’acide c’est pareil”.
Nous avons toutes deux porté plainte le mercredi 6 juillet.

 

#harcèlemeent de rue

natacha.lecamus
Auteur :
natacha.lecamus
H/F :
Femme
Lieu de l'incident :
Lyon, France
Date de l'incident :
30/06/2022
Univers :
Rue - Lieux publics en plein-air
Endroit :
Rue
Type de violence :
Message insultant, menaçant

5 réponses

  1. Chère Natacha,

    Merci pour ce que vous faites pour nous défendre.

    J’ai suivi votre histoire sur CNEWS en direct, je suis heureuse que nous soyons réunies.
    Je suis à votre disposition si besoin.
    Si seulement quelqu’un était intervenu avec la malice dont vous avez fait preuve.

    Girls power!

    Marie.

  2. Nantes, Lyon, Grenoble, Paris etc.

    Super idée de les filmer. Plus de pitié je filme.🤳
    Ca a marché on parle de toi partout. C’est chaud pour lui;)

    Comment les mettre en prison, à l’hopital psy ou loin de moi ? Ca existe des politiques qui ne font pas semblant? Parce que les numeros verts ne font rien pour les empêcher.

    I.

  3. Hello depuis Genève Natacha.

    Trsite de voir que ça ne s’arrange pas dans mon ancien pays. Le H de rue est une plaie que la justice et la police ne traitent pas. Comment tu as porté plainte avec l’autre victime ? Flics sympas? Il risque quoi ?
    Ici les mecs se tiennent sinon ils partent en prison ou dégagent de suisse. Même s’il y en a plus qu’avant.
    A+

  4. Chère Natacha, Chère protégée la communauté, depuis que tu as décidé d’en devenir membre. Merci de nous faire l’honneur de nous livrer ton témoignage intégral sur cet épisode traumatique.

    Tu as pu retourner cet événement en une force, avec toute cette exposition médiatique soudaine, bravo! Quel parcours en une semaine! Tu as aidé une femme, puis tu es devenue la victime, et tu as décidé de témoigner, pour “reprendre le pouvoir”, faire changer de camp cette peur.

    Tu as même aidé une deuxième victime et l’union faisant la force, vous avez porté plainte ensemble contre un individu désormais facile à identifier. (Nous serions heureux qu’elle vienne nous dire ce que ce même agresseur lui a fait et rejoigne les rangs des combattantes pacifistes mais efficaces, protégées et avisées. Appel lancé😉).
    Et on sait ici, que tu t’engages maintenant sur ce thème car tu as acquis très vite une visibilité indispensable.

    Nous aimerions te remercier aussi car tu nous offres l’intégralité de ton récit, riche en enseignements. A la fois sur la réaction de l’environnement, de la police, des médias, des victimes etc. Nous avons créé ce site pour toi, pour vous. (jetez un oeil sur notre site sour l’onglet “A PROPOS”, vous comprendrez mieux pourquoi ce site coûteux mais autofinancé par une victime, sans pub et gratuit, existe).
    Pour que les femmes et les hommes dont la vie est pourrie par des centaines de situations puissent dire ce qui leur arrive, se regrouper pour agir, se parler, s’entraider, et sortir d’un maximum de situations. Nous voulons aussi que les victimes soient indemnisées quand cela est possible (ça l’est plus souvent qu’on ne le pense) et vivent à nouveau paisiblement.

    QQMN, l’équipe et la communauté sont là pour toi si tu en as besoin. N’hésite pas à nous questionner et à partager l’évolution de ton dossier dans un ou plusieurs nouveaux témoignages.
    G.

  5. Alors en lisant ton témoignage je pense à deux choses.
    La première est que je suis admirative de ton courage. D abord d avoir interpellé cet homme qui n avait pas un comportement approprié (et de prendre un risque pour toi par conséquent) et d avoir porté publiquement ce qui se passe bien plus qu on ne le pense.
    Ça me rappelle que récemment nous avons été suivies avec une amie dans la rue par un homme et à part accélérer le pas nous ne avions trop quoi faire ?!

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